Cartopoïesis
Créer des cartes comme on trace des chemins intérieurs.
Ces dernières années, les tarots et oracles ont fleuri, révélant la richesse de leurs langages symboliques à un public de plus en plus vaste. Cette profusion a contribué à démystifier la pratique : elle l’a rendue accessible, vivante, plurielle.
Autrefois cantonnée à la prédiction ou à la superstition, la lecture des cartes s’est aujourd’hui transformée en un véritable outil de développement personnel, un dialogue intime avec soi-même, un miroir du sensible.
Mais dans ce foisonnement, quelque chose appelle plus loin, plus profond.
Je m’inscris dans cette continuité ouverte, tout en empruntant un chemin singulier : celui de la médiumnité artistique, du lien aux forces naturelles, aux matières vivantes, aux plans subtils.
Sortir du tarot pour revenir au geste.
J’ai longtemps tiré le tarot. J’aimais sa structure, ses symboles, ses mystères.
Mais un jour, j’ai arrêté. Non pas par rejet, plutôt par appel.
Un appel à créer mes propres cartes, à l’unité, dans le silence d’un atelier intérieur.
Un besoin de revenir au geste juste, à l’image singulière, à l’encre posée à la main.
Créer une carte, pour moi, ce n’est pas illustrer une idée : c’est canaliser une présence, écouter un symbole qui veut naître.
C’est une forme de médiumnité lente, artisanale, organique.
Cartopoiesis : un mot pour un acte vivant
J’utilise le mot Cartopoiesis pour désigner ce processus :
la création de cartes comme geste vivant, relié, symbolique.
Je ne tire plus les cartes comme une cartomancienne, je les crée.
Chaque carte naît dans une forme d’écoute, souvent sans intention préconçue.
Parfois, c’est une plante qui se montre. Parfois, un mouvement de pigments, une émotion, une mémoire.
Je laisse venir le trait, la couleur, le mot.
Je travaille avec mes encres naturelles, mes pigments récoltés, parfois même avec la terre ou la cendre.
Je ne cherche pas à décorer : je cherche à révéler.
À travers chaque carte, c’est une énergie qui se manifeste.
Un fragment d’âme. Une mémoire. Une réponse.
Depuis l’enfance, j’ai été attirée par les plantes.
Pas pour les classer. Pas pour les utiliser. Pas même pour soigner avec.
Mais pour être avec elles.
Les écouter. Les dessiner. Les laisser me parler.
Aujourd’hui, cette relation se poursuit dans mes créations.
Je ne transforme pas les plantes en remèdes. Je les laisse apparaître dans mes cartes,
comme alliées, messagères, figures du vivant.
Mes encres elles-mêmes sont faites de matières que je recueille :
terre, graines, rouille et plantes évidemment.
Je préfère le sauvage au purifié.
L’inspiré au défini.
Une carte à la fois.
Je ne sais pas si j’irai vers un jeu complet. Peut-être. Peut-être pas.
Mais pour l’instant, je suis cette voie lente : une carte à la fois.
Chaque création est une offrande.
Un talisman. Un souffle du monde traduit sur papier.
Et si ces cartes touchent quelque chose chez vous,
alors elles auront rempli leur mission :
non pas dire l’avenir,
mais faire vibrer le présent.